L’Approche Effectuale

L’Approche Effectuale

Ce chemin fédérateur et durable – 

Lorsque nous parlons d’approche effectuale, nous parlons en fait d’une démarche connue par beaucoup et voici donc une savoureuse analogie pour aborder le sujet :

Vous avez un diner à préparer.

Avez-vous plutôt tendance à faire les courses en fonction d’une recette que vous voulez cuisiner, ou à cuisiner en fonction de ce que vous avez dans les placards ?

Vous faut-il absolument acquérir des ressources pour commencer à faire, ou chercher vous d’abord àfaire, avec ce que vous avez ?

Ce sont bien 2 approches différentes nommées : Approche Causale ou Effectuale.

Pour une approche plus théorique nous dirons que :

  • Lorsque vous aller chercher des moyens, des « causes » vous permettant de « Faire » vous êtes dans une « Approche Causale »
  • Lorsque vous réfléchissez aux effets possibles avec les moyens dont vous disposez, vous êtes dans une « Approche Effectuale »

 

 

Et « ce que nous avons dans nos placards » lorsque nous développons un projet se sont d’abord nos propres ressources, notre personnalité, nos acquis, nos relations …

Nous verrons qu’avec cette approche effectuale, notre objectif final peut être très différent de l’idée première, car nous avons su écouter les évolutions environnantes et nous y adapter.

L’approche effectuale  (ou l’effectuation) 

et ses cinq piliers

  • « Démarrer avec ce que vous avez »

L’effectuation part donc de ressources existantes quesont :

  • La personne que nous sommes 
  • Nos connaissances qui résultent de l’expérience, de la formation, de notre l’éducation …
  • Nos relations qui nous inspirent, nous accompagnent …

Et ce sont ces ressources actuelles qui déterminent aussi les objectifs. Car les ressources dont vous disposez aujourd’hui sont plus utiles et plus importantes que d’hypothétiques ressources dont vous ne disposez pas.

  1. « Raisonner en perte acceptable »

Le principe de la perte acceptable consiste à être prêt à perdre quelque chose de défini pour gagner quelque chose d’indéfini.

C’est admettre qu’essayer quelque chose, c’est aussi accepter l’idée que cela ne fonctionne pas ou pas tout de suite ; il est donc utile de cerner ce que l’on peut se permettre de perdre, en salaire, en temps ou en légitimité …L’exemple classique est le cadre au chômage qui se dit «Je vais travailler sur cette idée, et si ça n’a pas pris dans six mois, je me remets à chercher du travail» 

  1. Voir son projet comme un patchwork dont le résultat final n’est pas connu à l’avance

Car le résultat n’est pas prévisible, il dépend aussi de la contribution de chacun et ce sont les ressources mises en commun qui orientent le résultat final et ouvrent de nouvelles perspectives. 

Un projet entrepreneurial est un processus social et plutôt que de penser « concurrence » nous pensons ici à la création de partenariats afin de « co-construire » l’avenir ensemble. 

Il est donc important de définir des bases communes et garder la souplesse nécessaire pour accueillir les propositions d’autrui. L’objectif n’est donc pas de planifier mais de fédérer.

La progression se fait par l’engagement d’un nombre croissant de parties prenantes et c’est l’augmentation des parties prenantes, qui développe aussi les ressources et donc les objectifs.

  1. Accueillir les surprises de façon favorable

La survenue d’un évènement inattendu peut provoquer une innovation grâce à la bonne réaction de l’entrepreneur.

Ce principe est basé sur un proverbe anglais dont une mauvaise traduction serait : « si la vie vous envoie des citrons, faîtes de la citronnade ».

Il repose sur les effets positifs de la surprise. L’objectif n’est donc pas de chercher à les éviter mais à se préparer à y répondre.

Ceci permet d’être réceptif aux signaux du marché et d’accueillir les évènements positifs ou négatifs pour y détecter d’éventuelles opportunités. Il faut être capable de redéfinir ses objectifs qui émergent en fonction des ressources mais également des surprises qui arrivent.

Il est ici parfaitement admis de démarrer sur une idée, et de partir sur une autre à la suite d’une observation fortuite, d’une suggestion d’un client ou d’un accident.

  1. Créer le contexte 

Plutôt que d’essayer de deviner le marché nous allons tenter ici de l’inventer.  C’est la vision créatrice de l’entrepreneuriat, selon laquelle le rôle de l’entrepreneur est de créer de nouveaux univers, et non de découvrir les univers existants ou il va se battre contre les autres.  L’action est privilégiée à l’analyse car elle est source d’apprentissage mais aussi de transformation de l’environnement.  Action, transformation et cognition sont ici étroitement liées.

En conclusion :

Dans l’approche effectuale, le point de départ d’un projet est « la personne » et le « déclencheur », est souvent un problème à résoudre.

Les idées de départ sont souvent très simples et on ne raisonne pas en termes de bonne ou mauvaise idée mais plutôt sur le fait qu’une idée et une action peuvent déboucher sur une opportunité (opportunité dans son sens plus anglicisme ou il parle de circonstances favorables)

Sans action, une idée n’a pas d’intérêt, pas de valeur. L’effectuation insiste sur la nécessité d’agir pour penser, elle met en avant une vision dynamique et positive de l’opportunité ; d’une opportunité qui n’existe pas en elle-même, attendant d’être découverte par un individu visionnaire mais plutôt construite par l’action entrepreneuriale.

 

Origine théorique de l’Approche Effectuale

« La méthode entrepreneuriale, comme l’a fait la méthode scientifique, va fondamentalement changer le monde. Elle est déjà en voie de le faire. » 

Saras Sarasvathy

une autre voie pour la croissance

(ou Effectuation, selon les auteurs)

Cette approche a été étudiée par Saras Sarasvathy, enseignante chercheuse en entreprenariat

Elle est considérée comme une éminente spécialiste de l’esprit d’entreprise et a étudié le parcours de nombreux d’entrepreneurs 

La chercheuse est ainsi allée à la rencontre de 27 entrepreneurs ayant connu le succès lors de la création de leurs entreprises (chiffre d’affaires variant de 200 millions de dollars à 6,5 milliards de dollars) … elle a  mis en lumière le fait que ces entrepreneurs ne suivaient que rarement la classique démarche prédictive, mais avaient recours à un tout autre raisonnement. 

SarasSarasvathy a ainsi constaté que l’entrepreneur ne raisonne pas selon la logique causale mais qu’il applique cette logique inverse appelée la logique “effectuale”.

Nous pouvons penser que ces visionnaires ont simplement su se défaire d’un carcan imposé pour oser se réapproprier ce qui avait toujours été une démarche entrepreneuriale naturelle. 

L’approche causale fut amplifiée par le développement des Business Plan et Business Model 

Imposé à chaque créateur mais Claude Ananou – Maître d’enseignement en formation entrepreneuriale – à HEC Montréal nous rappelle ceci :

  • Les Business Plan ont été conçu pour pallier la méconnaissance qu’avaient les acteursdu système financier surun secteur qui émergeait : l’informatique.

En effet, de nouveaux entrepreneurs arrivaient sur le marché et il était bien difficile aux banquiers de se prononcer sur la viabilité d’activités que seuls ces jeunes informaticiens maitrisaient.Il leur a donc été demandé de rédiger des Business Plan et Business Model, pour que les banquiers puissent se projeter, dans ce nouveau monde qui émergeait. 

Puis cette pratique s’est généralisée jusqu’à devenir normalité.

Cette crise liée au « COVID » va ainsi amoindrir la place de ces outils qui demandent de se projeter à 3 ans, postulat qui semble bien être devenu très aléatoire.

Il est même probable que l’intensité de ce que nous vivons nous impose de réapprendre « à faire avec ce que nous avons » 

Car l’humain est ainsi fait, quelle que soit la méthode utilisée, il a toujours créé, utilisé ses ressources personnelles et vécu entouré d’autres humains avec qui il a partagé des savoir-faire.

La place croissante de l’approche effectuale est également une excellente nouvelle pour la nature car, basée sur l’utilisation de ressources existantes, elle permet d’économiser les ressources externes que nous savons maintenant « épuisables »

 

Une approche pour braver l’incertitude

Une approche pour braver l’incertitude

Claude Ananou, Maître d’enseignement à HEC Montréal, et multicréateur partage le constat suivant :

  « les plus grands succès tels Microsoft, Facebook ou Google sont nés d’une intuition et d’un rapide passage à l’action » 

Il a suivi les enseignements de Saras Sarasvathy, à l’origine de « la théorie de l’effectuation »

Basée sur la compilation des études disponibles, les observations et des multiples les échanges autour des créateurs à succès, elle permet de comprendre leurs cheminements et théoriser leur pensée.

Claude Ananou a partagée les données de cette Approche Effectuale sous le nom de l’Approche « SynOpp » – Alchimie rédactionnelle entre « Syn »= faire le lien »  et « Opp » = opportunité

Cette approche est maintenant suivie par des dizaines de milliers de porteurs de projets canadiens et d’ailleurs .

Elle est également le FIL ROUGE de GrenobLE LAB

 L’Approche SynOpp :

Dans l’approche SynOpp, tout commence par l’identification d’un besoin, puis  de la solution pour y répondre.

Le porteur de projet va donc créer son marché ou il va apporter « un avantage prépondérant » par rapport à l’existant.

La première particularité est ici de valoriser les étapes intermédiaires par rapport au but final

 Le créateur entre donc plus directement dans la phase « test » où son modèle d’affaires va se construire peu à peu à travers la validation de son projet en grandeur nature. Il va ainsi en parler, s’engager et adapter celui-ci en fonction de l’accueil réservé et des mutations de contexte.

L’approche SynOpp favorise l’action et la décision mais aussi la multiplicité des échanges et la réflexion, elle accompagne ainsi l’intuition des besoins qui ont été pressentis et crée une « opportunité » – terme anglosaxon que nous appelerons plutôt  ici « les conditions favorables » .

 Claude Ananou représente donc sa démarche par une spirale afin de démontrer que la progression n’est pas linéaire, mais bien itérative et progressive .  On commence petit et cela prend de l’ampleur

 

 4 étapes sont distinguées: 

 

 Nous analysons, avec une approche globale,

  • Nos valeurs, notre expérience, notre réseau
  • Notre environnement
  • Puis … le projet lui même

pour ensuite:

  • Identifier le besoin
  • Analyser ce que l’on apporte
  • Adapter notre solution au besoin du client

La 2e étape est d’accepter qu’entreprendre c’est partir à l’aventure, c’est « l’Heuristique  » et qu’il faut parfois savoir passer à l’action sans trop réfléchir, si l’on sait travailler sur les boucles de rétroaction pour remédier jusqu’à aboutir aux meilleures décisions

 Nous parlons donc ici d’Itérativité : Cette faculté de savoir recommencer, reprendre, reculer pour mieux repartir avec cette certitude que l’on apprend de ses erreurs. C’est la nécessaire modestie de tout porteur de projets

Nous parlerons pour finir de Synchronicité, cette cohérence qui donne du sens à des événements qui n’avait pas forcément de cause à effet entre eux.

C’est être capable de fusionner les rencontres et les découvertes avec cette capacité de donner une finalité et un sens à ce qui paraissait hétéroclite

 Nous parlons donc bien de créativité chez le porteur de projet car agencer, mettre les choses ensemble, c’est de la créativité …

Nous sommes maintenant bien au delà de la « fenêtre d’opportunité » mais ce sont les éléments créés qui sont devenus Opportunité unique !

 Nous découvrons ainsi, à travers cette approche, ce qu’est la Sérendipité, cette capacité à trouver quelque chose en cherchant autre chose, à profiter des situations hasardeuses et les transformer en situation intéressante.

 Elle ouvre les esprits et permet d’identifier des pistes. Nous parlons donc ici « d’élargir le « champ des possibles » …

 Une question se pose souvent au cours de cette approche : Peut-on développer la Sérendipité ?

 Mais peut-on provoquer la chance ? Cette métaphore est presque un oxymore car « la chance ne sourit qu’aux esprits bien préparés » avait coutume de dire Louis Pasteur

 Il faut pour cela s’ouvrir aux informations,  aux autres, developper sa curiosité, augmenter sa vigilance entrepreneuriale, sa capacité d’identifier des affaires, savoir faire les liens et créer ainsi les opportunités !

 Sortir de sa zone de confort, être curieux, c’est cela provoquer la Sérendipité mais c’est aussi cela vivre l’approche SynOpp

 Mais il y a une dernière étape avant le lancement qui est de réfléchir à son degré d’engagement, savoir s’accorder une phase de réflexion : « qu’est-ce que je suis prêt à perdre sur le plan financier, personnel, réputation, estime de soi ? » car après avoir aussi vérifié que le créateur est bien en phase avec son projet, son projet avec le marché, il est essentiel de valider que les risques d’échec sont cernés et acceptés.

C’est ce que Claude Ananou appelle, « notre sensibilité à la perte » et elle peut être différente selon les personnes, ce n’est pas un projet qui est à risque pour lui, mais bien notre subjectivité.

Maintenant nous allons passer à l’amorçage du projet; celui qui consiste à développer des prototypes, à lancer une petite production ou initier une action. Pendant l’amorçage, nous allons travailler avec « nos fidèles ». Ici, on teste, on prend les premières commandes, les premiers engagements …

Cette étape est fondamentale, se fait dans la confiance et permet de vérifier notre identification du besoin, d’ajuster notre solution, vérifier que nos avantages sont clairement là.

Et enfin la dernière étape : le déploiement

C’est ici que son entreprise se développe, passe à la vitesse supérieure. A cette étape, il faut bien souvent revoir les besoins, c’est l’aspect « itératif » de l’approche SynOpp…mais ce déploiement n’est volontairement pas traité par Claude Anouna dans ce module, certainement pour nous laisser toute la latence pour nous plonger maintenant dans l’élaboration de nos Business Model et Business Plan

Nous pouvons donc avancer l’idée que la démarche SynOPP c’est une façon d’initier l’entreprise mais c’est aussi et surtout un état d’esprit. Il n’est en rien opposé aux Business Model puis Business Plan mais a une valeur inestimée lorsqu’il vient en amont.

Le créateur a alors déjà « vécu » son projet, l’a pensé, adapté; il a ainsi vu toutes les opportunités et impasses en amont de la rédaction de ces 2 étapes traditionnellement attachées à toute création d’entreprise. Son analyse s’en trouve facilitée et enrichie .

L’élaboration des Business Model et Business Plan vient alors structurer le projet, rassurer les financeurs pour ne plus être le « cauchemar des postulants créateurs » ou une simple étape obligée mais un véritable «outil» pour sortir les projets des carcans et oser l’innovation sociale qui nous porte au-delà des lignes établies.